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dimanche 31 mai 2015


Le Printemps met toujours un brin de temps à prendre ses quartiers à Paris . C'est un magicien adepte de la procrastination, dirons-nous . Il lui faut deux bons mois avant de faire grimper le mercure d'un coup de baguette magique, et surtout avant de tirer le soleil paresseux de son sommeil hivernal et lui intimer l'ordre de monter la garde dans le ciel bleu de la capitale. Avril doit tirer sa révérence pour qu'enfin nous puissions remiser fourrures et lainages et arborer soieries et cotonnades .

Sitôt le mois de Mai arrivé, l'envie nous prend de déserter Paris et gagner des contrées au quotient ensoleillé plus élevé . C'est sûr qu'avec son chapelet de jours fériés et sa farandole de grands-messes surmédiatisées, Mai sonne le glas de notre sédentarité. Quand certaines d'entre nous se dévêtissent et se déchaussent pour aller fouler le sable des plages normandes , d'autres se chaussent de stilettos à se fouler la cheville et cachent tout juste leur nudité pour se hisser en haut des marches du palais des festivals de Cannes.

 Mais qu'on ne s'y trompe pas ! Ce n'est pas l'amour du 7eme art qui guide leurs pas ! Pour la majorité d'entre elles, la motivation première n'est pas de s'intéresser aux films en compétition , mais plutôt d'entrer en compétition avec les autres festivalières qui ont payé , comme elles , leur place très très cher et très loin du grand écran, d'ailleurs. Peu importe! Bon nombre de projections sont très barbantes, d'autant que les films étrangers sélectionnés ne sont pas doublés mais seulement sous-titrés. Et puis quoi encore !

Ah, Cannes ! Tout le mode en rêve ! C'est un peu le rêve américain du Français moyen . Il a  besoin de fantasmer , le pauvre. Personne n'oserait l'en blâmer . Entre le burn-out ( surmenage) et le bore-out ( sousmenage) , les soucis au sein de son ménage ( quand il en a un ) et les corvées de ménage ( ça , malheureusement , il en a toujours ), notre concitoyen éprouve le besoin de s'évader .

Or quoi de plus magique que le tapis rouge ( à défaut d'être volant ) sur lequel , le temps d'un shooting éclair (gare aux phosphènes ! ) , les grappes de stars jouent aux stars devant des hordes de badauds émerveillés ! Pour une fois que le petit écran augmente la sécrétion d'endorphines du cerveau du téléspectateur de base. Ces derniers temps surtout, ce dernier est sujet à des crises d'angoisse aiguë . Le JT, il ne veut plus en entendre parler , surtout depuis que des pilotes psychotiques s'amusent à crasher des avions.

Pour ceux qui ne seraient pas fans du tapis rouge , reste la terre battue de Roland Garros . Contrairement à Cannes, on peut y aller en métro et on ne risque pas de s'endormir devant un film pseudo-intello au tempo largissimo. En plus on est au grand air. Pas besoin de smoking ni de robe ultra glamour. Une paire de running stylées et de solaires griffées feront amplement l'affaire. Ah, j'oubliais ... On a beau être en Mai, il faut prévoir le parapluie , surtout si l'on est dans la tribune VIP ;-)

vendredi 15 mai 2015



Avez-vous  remarqué comment, dans le métro, les usagers s'adonnent avec délectation au jeu des chaises musicales? S'asseoir dans le sens de la marche fait partie de leur priorité, de leur instinct, même. Sans doute pour des raisons imputables  aux lois de la physique. La force d'inertie y est pour quelque chose, elle qui nous procure, en cas d'accélération, la délicieuse sensation de notre corps projeté en arrière.

Mais il semble que cette compulsion à suivre un mouvement donné soit ancrée dans l'esprit de certaines plus qu'il n'y paraît . Comme si elles avaient trop lu Rabelais et vouaient aux moutons de Panurge une passion exacerbée. Mû par un instinct grégaire, leur cerveau reptilien leur enjoint de suivre le troupeau, se fondre dans la masse , et  ne surtout pas faire de vagues, pour éviter tout risque de noyade. Elles laissent pour cela à d'autres le soin d'ouvrir la marche, se contentant seulement de leur emboîter le pas .

Vestimentairement parlant, elles se laissent cornaquer par les gourous de la fashionsphère, qui, à trop vouloir causer de remous médiatiques, sont trop souvent garants d'un mauvais goût hyperbolique. Faux pas assurés quand elles s'avisent de plagier ces pseudo-stars aux morphologies cubistes.  Ces derniers temps , il semblerait que la tendance soit aux phénomènes de foire. On ne compte plus les défilés des clones de la Venus Hottentote. Le red carpet est rassasié de fessiers hypertrophiés qui exposent sans sourciller leur quasi nudité. C'est sans doute parce qu'ils sont dénudés que les popotins imposants ont tant de popularité! Ils arrivent même à concurrencer les poitrines prêtes à imploser! C'est vous dire ...

Mais il n'y a pas que sur le terrain de l'apparence que s'exerce cette tendance avérée au mimétisme. Pour conquérir le marché fructueux des célibataires avant qu'elles ne deviennent des célibs à terre , les trendsetters traînent partout, dans les cuisines comme dans les lits. Ils les gavent des bienfaits des truck foods et du slow food , avec food porn à l'appui . Ils leur font miroiter le septième ciel en les convainquant de se lancer de nouveaux défis érotiques pour capturer le cœur de leurs amants. Plus besoin de baguette magique pour parvenir à leurs fins! La fibre optique accomplit des prodiges en répandant la bonne parole prêchée sur les forums électroniques .

Est-ce à dire qu'il n'y a point de salut hors de ces modes de vie formatés et adoubés par le plus grand nombre? Le sort d'un mouton serait-il plus à envier que celui d'une brebis galeuse? Au moins la brebis aura le mérite de ne pas finir dans une assiette, contrairement au mouton qui saura malheureusement à quelle sauce il sera mangé. Les moules sont faits pour être cassés ; comme les œufs , si l'on a pour dessein de déguster une omelette. Nager à contre-courant n'a jamais nui à personne. Mais pour ce faire, encore faut-il vaincre cette force d'inertie qui amollit notre libre-arbitre et recouvrer enfin nos esprits!

jeudi 30 avril 2015


La nature a horreur du vide, disait Aristote. Mais l'être humain entretient avec lui une relation des plus paradoxales. Il est certain que notre instinct premier nous incite à le repousser. Qu'il soit physique ou métaphysique, il nous terrifie, le vide. Il semble même que la hantise qu'il nous inspire soit l'un des principes qui motive notre agir et nous engage à réfléchir sur notre devenir.

Les trous,  au sens propre comme au sens figuré, on les comble. Nous sommes des bricoleurs-nés, toujours prêts à reboucher des cavités, comme si nous avions la crainte d' être aspirés. Que ce soit les dentistes qui obturent les dents cariées, les agents de la voirie qui macadamisent les chaussées,  ou les couturières qui raccommodent les chaussettes, on passe son temps à faire un sort à ce qui nuit à notre sacrosainte idée de l'uniformité. Le trou, comme la tache, ne sont pas en odeur de sainteté . Il faut à tout prix les éviter .

Dans nos conversations aussi, le vide n'a pas bonne presse . Il n'est pas de bon ton de laisser de longs blancs dans les discussions. Dans certains cas, Ils sont propices à éveiller la suspicion : on est vite taxés de dissimulation. Quant à la panne d'inspiration, fuyons-la! Elle nous fait passer pour des êtres doués de peu de réflexion, et donc impropres à la communication .

Parlons-en de la communication! Elle va bon train en ce monde, surtout qu'on parle de tout et de rien, et que l'on fait aussi beaucoup de bruit pour rien. Dès lors, le vide sonore  qu'on appelle communément silence, bien loin d'être une vertu, figure en tête de gondole des vices. Il faut absolument maîtriser son outil langagier, employer impérativement les mots branchés, ne pas jouer les abonnés absents des actualités régurgitées à volonté sur les réseaux sociaux. En un mot, il faut "avoir du swag"!

Bien-sûr , cette hyperprolixité verbale cache mal le vide abyssal dont souffre notre société . Si l'on veut combler tant de trous, reboucher tant de cavités, dissimuler tant de crevasses, c'est que l'on sent bien que face à nous, se dresse une béance incommensurable, celle qui nous sépare de la divinité. Le fossé s'est creusé de siècle en siècle . Nous avons dédaigné de l'écouter, ce Dieu qui parlait à notre cœur, et il a fini par se taire, lassé de nous voir nous éviscérer et  nous vider de notre humanité.

 Dans un monde désormais vide de sens, il ne nous reste plus qu'à contempler avec horreur le vide ultime de notre tombe qu'un jour nous emplirons de nos souvenirs, et surtout de nos regrets...


mercredi 22 avril 2015



Posséder ! Il semble que ce soit le maître-mot de nos existences  Détenir des biens et des richesses tout d'abord, mais aussi  des connaissances et des compétences , tout autant que des relations , qu'elles soient professionnelles, amicales ou amoureuses. Se définir , en somme, par ce que l'on a,  plutôt que par ce que l'on est réellement. Serait-ce spécifiquement  l'ADN propre à notre époque, comme certains le décrient? Ou ne serait-ce pas plutôt une tendance innée, un acte involontaire qui nous dépasse, une caractéristique quintessentielle de l'espèce humaine ?

Il est de mon humble avis que l'instinct de propriété fait partie de l'archéologie de notre moi. Essayez de retirer des mains le jouet d'un enfant, et vous rencontrerez une résistance qui se manifestera par des cris et des pleurs, symptômes d'une frustration intolérable. Même si la notion de partage nous est enseignée dès notre plus jeune âge, force est de constater que nous prêtons, avec un déplaisir plus ou moins grand, ce qui nous appartient. Comme si nos possessions matérielles étaient une prolongation de nous-mêmes, et que les céder, même pour une brève durée, revenait à nous amputer de l'un de nos membres.

Idem des relations humaines. La naissance d'une fratrie nous contraint à repenser avec hantise notre place au sein du cercle familial. Nous nous sentons menacés, en quelque sorte, d'une carence affective aussitôt que le nouveau-né reçoit,de la part de notre génitrice, les attentions qui nous ont jusque-là été réservées. C'est que nous avons tous en nous cet irrépressible besoin d'être préféré, de voler la vedette aux frères et sœurs dont nous craignons qu'ils usurpent notre rôle sur la scène parentale.

Le sentiment d'insécurité, aussi infondé qu'il soit, qui a pu voir le jour dans le contexte familial , ressurgit avec une intensité décuplée à l'adolescence, quand nous entrons de plain-pied dans l'arène des relations amoureuses. Non seulement doit-on livrer bataille pour conquérir le cœur d'un autre , mais encore faut-il tout mettre en œuvre pour s'en assurer l'exclusivité. Non seulement faut-il se faire aimer de l'autre, mais encore faut-il décrocher le trophée de " préféré(e) ", et surtout  le conserver .

Or quoi de plus labile que le sentiment amoureux! S'il est un des domaines dans lequel l'instabilité règne en maître, c'est bien celui du cœur. On sait quand une histoire d'amour commence, on ne sait jamais quand elle va finir. On la voudrait éternelle , on croit posséder le cœur de l'autre , on va jusqu'à faire officialiser le lien en établissant une alliance conjugale. Mais on oublie que s'il y a possession dans l'amour, elle ne  s'exerce qu'à nos dépens . Nous sommes plus possédés que nous ne possédons vraiment .

 "Aimer est un mauvais sort, comme ceux qu'il y a dans les contes, contre quoi on ne peut rien jusqu'à ce que l'enchantement ait cessé." Cette envoûtante citation de Proust pointe de sa baguette magique l'acception du verbe " posséder " dans ce contexte particulier . La possession est d'ordre démoniaque . Elle n'est pas neutre . Nous ne nous appartenons plus . Nous perdons la maîtrise de notre volonté. Nous capitulons devant l'irrationnel, impuissants que nous sommes , et endurons des souffrances quand le sortilège n'opère plus .

Qui donc nous en voudrait de tenter de conjurer le mauvais sort en nous tournant vers la possession de biens matériels ou immatériels ? Ne jetons pas l'anathème sur notre société de consommation et notre frénésie matérialiste . Je parierais fort qu'au Paléolithique , l'hominidé manifestait le même instinct de propriété que nous . Sa caverne n'était certes pas celle d'Ali Baba , mais elle n'en était pas moins remplie des possessions qui avaient le plus de valeur à ses yeux . Car lui aussi avait un coeur , et il saignait tout autant que le nôtre ...

mardi 14 avril 2015




L'homme est un animal doué de déraison. Où que l'on regarde, on ne peut que constater son inaptitude, sa persistance même à nier les préceptes que lui dicte la sagesse. Ses réflexions ne sont jamais mûres, et ses actions le conduisent bien souvent à la négation de son souverain bien, voire à son propre anéantissement .

L'instruction, bien souvent, en lui ouvrant de nouveaux  horizons, ne sert qu'à lui donner des aspirations délirantes et défiant toute proportion. L'exploration de l'infiniment grand comme de l'infiniment petit lui confère un sentiment de domination enivrant. Il se sent comme "maître et possesseur  de la nature ." La connaissance pour lui est une arme de destruction et non un outil de pacification. Son instinct de guerrier l'incite à coloniser plutôt qu'à cohabiter avec les espèces de ce monde. Sur terre, sur mer comme dans les airs , il ne sème que douleur et désolation .

Même la religion , dont la vocation première est de relier les hommes, est victime de manipulation. Elle divise au lieu d'unir. Tombée aux mains d'individus sans foi ni loi, assoiffés de pouvoir, elle est le fer de lance de la régression et de l'oppression. Au lieu de nous guider sur la voie du bonheur, elle dresse devant nous le spectre de la terreur, l'intolérance et le néant . La suspicion , la délation et la peur sont devenus le quotidien de bon nombre de croyants .

Même les gouvernants, à court de solutions, n'occupent le devant de la scène qu'en nous proposant  le pitoyable théâtre de leurs dissensions et le spectacle farcesque de leurs liaisons à rebondissements . Même pas de quoi alimenter les fantasmes des ménagères de plus de cinquante ans, habituées à  la silhouette testotéronée de Monsieur Propre, indétronable emblème de leur gamme favorite de produits d'entretien  ....

A quoi donc accrocher nos espérances si toutes nos croyances volent en éclat, si nous accordons notre confiance à des êtres qui seront coupables un jour de trahison ? Si nous ne voulons pas devenir des Alceste fuyant le genre humain, ou des despotes sanguinaires visant à l'asservir, il nous reste à reconquérir le lien perdu avec cette nature qui nous a tant donné et que nous avons tant malmenée. Elle seule détient le pouvoir de notre guérison et saura cautériser les plaies que nous nous infligeons , tant nous nous laissons abuser par les mirages de notre déraison .



mardi 31 mars 2015

Les commémorations , on aime bien ça, dans nos sociétés occidentales . On nous ordonne de nous souvenir . Surtout de choses qu'on n'a jamais vécues . De la barbarie humaine aussi bien que de la transcendance divine . Au nom du sacro-saint devoir de Mémoire. A ces célébrations historiques ou religieuses se greffent un chapelet d'autres fêtes , à visée principalement commerciale , comme la Saint Valentin, où on nous impose d'assigner une valeur marchande à ce qui n'en a pas : l'amour. Comme si ça ne suffisait pas , on a décidé d'attribuer une fonction aux jours de l'année restants . Alors des instances supérieures ont planché sur la question , et le résultat mérite qu'on lui prête toute notre attention.

Pour une grande majorité , les journées mondiales sont dédiées à des populations dont le trait commun  est leur vulnérabilité . Parmi les mieux représentés , les sujets souffrant d'une pathologie ou d'un handicap invalidant: Sida , cancer , lèpre , tuberculose , pneumonie , Parkinson ,  paludisme , hémophilie,  pour les affections les plus graves ; surdité ou bégaiement , pour les handicaps . Ce sont les journées " contre " .

Il existe aussi les journées " sans " : sans voitures , sans achats , sans téléphone portable , sans tabac . Ce sont les journées anti-société de consommation , en quelque sorte , ou anti-addiction . Ce  qui n'est pas si mal, après tout . On se soucie de notre santé  et de notre équilibre. Et au passage, on en profite pour rendre hommage à  Dame Nature dans toute sa diversité.

Car, notons-le,  il y a beaucoup de journées mondiales  écolo, dans le calendrier grégorien . Il n'y a qu'à recenser celles où il est question de l'eau . Qu'il se décline en rivières , mers ou océans , l'élément liquide est maintes fois célébré dans l'année . La faune tient aussi une place de choix . Oiseaux migrateurs , chats , lions , éléphants même . De quoi réveiller nos envies d'exotisme .

Moins exotiques sont les journées consacrées aux femmes. Celles qui sont encensées , ce sont les femmes rurales , les infirmières , les secrétaires , les sages-femmes et les ... ménopausées ... Aucun risque de nous faire atteindre l'orgasme , lui qui , pourtant , est à l'honneur le 21 décembre . A quatre jours près , on était en plein blasphème ...Citons parmi les journées mondiales les plus insolites , celles du tricot, de la plomberie, des jeux vidéo et des toilettes... Il faut dire que sans les latrines, la vie serait un enfer .

Mais il faut garder le meilleur pour la fin . Il existe , fort heureusement , des journées placées sous le signe de la positivité . La maladie, la discrimination, la cruauté , on n'a qu'une envie , c'est de les oublier au plus vite . Il faut arrêter de nous faire culpabiliser .  Mes journées favorites , et les vôtres , sans nul doute , ce sont celles du sourire et du rire, de la gentillesse et de l'amitié , des câlins et du bonheur . Parlons-en du bonheur . Il n'est pas assez représenté , le bonheur. A lui seul,  il mériterait qu'on lui dédie les 365 jours de l'année!

jeudi 26 mars 2015


Dans cet univers  de l'hyperconnexion où l'on peut joindre n'importe quand, n'importe où, n'importe qui , force est de constater que nous vivons retranchés dans le bastion de notre indifférence au monde qui nous entoure , comme si le trop-plein d'informations et d'interactions digitales saturait notre besoin  d'immersion dans le bouillonnement incessant du réel .Pris au jeu, nous assumons notre condition de pion sur l'échiquier du désir  fluctuant, prompts à nouer et dénouer des amitiés virtuelles  , érigeant autour de nous un cordon de sécurité quand le cordon ombilical de nos relations sur la Toile se fait trop étouffant .

Nombreux sont ceux qui jettent l'anathème sur ce mode de consommation sauvage , arguant du fait qu'il fait fi de la sensibilité et susceptibilité des différents actants . Mais ils oublient, en passant , que hors de son contexte professionnel , le web n'est qu'un terrain de jeux , une partie de cache-cache aux bornes temporelles infinies puisque les écrans sont aussi résistants que des masques de fer tant que les participants ne décident pas de faire le grand saut dans l'ici et maintenant de la rencontre physique. On se farde de l'identité qu'on veut , à commencer par un pseudo, et, par un effet de miroirs vertigineux, se met en place une mise en abîme de faux semblants qui alimente le fantasme et trompe l'ennui.

Car , il faut bien le dire, on s'ennuie à en mourir dans nos sociétés à géométrie invariable, dans nos foyers centrés sur la sacro-sainte famille et le bien-être bon marché procuré par les émissions de télé-réalité et les voyages bon marché. Alors il faut bien s'évader. A moindre frais. Cela n'engage à rien. On parle à des inconnu(e)s. On se découvre des passions inavouables communes qui épicent notre imaginaire sclérosé par une vie de couple qui s'est émoussée. On se dit qu'on est moins seuls sur terre , qu'il est encore temps de refaire sa vie car, manifestement , on s'est trompés de partenaire.

Les plus naïfs d'entre nous sont prêts à tout sacrifier pour un shoot d'euphorie qui les fera décoller du ciment de leur quotidien. Sauf qu'ils oublient que , derrière l'écran, se tiennent des escrocs de l'apparence , des simulateurs/simulatrices n'ayant rien à perdre , des paumé(e)s dont la seule visée est de faire perdre l'équilibre à ceux qui se sont laissés berner par leur promesses fallacieuses. Car ce sont des joueurs tout-terrain, des aventuriers intrépides , et la Toile leur offre un nouveau défi qu'ils ont bien l'intention de gagner.

Alors pourquoi leur jeter la pierre, à ces imposteurs ? Reproche-t-on aux joueurs de poker de bluffer ? Plutôt que de les stigmatiser, jugeons avec plus de sévérité les pères/mères, époux et épouses démissionnaires, qui ont fui leurs responsabilités et ont cru, à tort, à une meilleure destinée en accordant leur confiance à des êtres dénués de réalité. Ils n'ont pas mérité ce qu'ils ont lâchement abandonné et paieront, un jour ou l'autre, le prix de  leur excès de crédulité.