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dimanche 29 septembre 2013

    On dit que le temps c'est de l'argent. C' était vrai à une certaine époque , mais à notre ère supersonique , le temps , c'est de l'or. Que ne fait-on pas pour l'économiser! Pour preuve, la prolifération des produits trois-en-un.

    Auparavant la multifonctionnalité n'était  l'apanage que des robots culinaires. D' un coup de baguette magique, on coupait, hachait menu et mélangeait les ingrédients . La ménagère lambda se découvrait soudain une âme de bricoleuse en exhibant son habileté à assembler les pièces détachées de ces  objets non volants identifiés . Du même coup  , elle démontrait qu'elle savait utiliser sa cervelle . L'homme n'avait qu'à bien se tenir  ! Chose nouvelle, par les temps qui courent , le trois-en-un ne se cantonne plus  seulement à l'espace de la cuisine . Il envahit salons, chambres et salles-de -bain. Que ce soit les canapés , les imprimantes, les poussettes , et même les miroirs maintenant,  beaucoup d'objets de la vie courante se voient dotés du don de transformisme d'un Arturo brachetti.

    Fait notable, ce concept fait florès auprès du public féminin , particulièrement dans les domaines cosmétique et vestimentaire . L'épiderme et la chevelure féminine sont la cible privilégiée de ces démaquillants  et shampoings aux vertus multiples et miraculeuses. Au sein des firmes à but fortement lucratif, on se lance dans une course contre la montre pour mettre au point la formule magique qui nettoie , désincruste, et hydrate le visage , ou bien lave, démêle et nourrit les cheveux. Les laboratoires de cosmétologie doivent se plier en quatre pour satisfaire la demande croissante de consommatrices de plus en plus exigeantes . Exit le deux-en-un ! On passe à la vitesse supérieure .

    La garde-robe féminine n'est pas épargnée non plus, et les accessoires qui vont avec. Le sexe faible fait état de  sa virtuosité à métamorphoser une robe de ville en robe de soirée en un tour de main. Idem pour les sacs. Fini le temps des collectionneuses ! Au gain d'espace dans les armoires se greffe un gain de temps. Il est vrai que les femmes passent leur vie à courir , et qu'il est donc vital qu'elles ne sacrifient  pas tout  leur temps libre à s'adonner à des futilités pour leur bien-être .  Elles ne sont plus au foyer depuis des lustres , mais elles ne font pas tapisserie à la maison quand elles ont enfin le loisir de la réintégrer. Dans l'inconscient collectif , une femme doit être rentable , et doit surtout penser aux autres avant de penser à elle-même...

    Bref, vous l'aurez compris, l'avènement du trois-en-un , ce n'est qu'un leurre de plus pour rappeler à la femme qu elle n'a nul besoin de gaspiller du temps pour s'occuper d elle-même . Car appliquer une seule crème, un seul shampoing  au lieu de trois , cela fait une sacrée différence d'abord  financièrement parlant , mais surtout  temporellement . Sous le couvert de procurer des bienfaits jusque-là ignorés à la gent féminine ,  ces produits nouvelle génération l'asservissent davantage . La guerrière des temps modernes  dispose de plus de temps pour moins se consacrer à son apparence .

     Sonnez , clairons! Il est impératif de réparer cet outrage au plus vite . Pour cela , je ne vois qu'une solution. C'est de demander à Dieu , plutôt qu'à ses saints , un miracle . Prions  pour qu'un homme nouveau voie le jour , un homme unique aux qualités multiples , un dix-en-un si possible , l'homme-orchestre dont toute femme rêve , qui conjugue les talents d' un époux, confident, amant, père, cordon bleu, chauffeur , plombier, électricien, agent d'entretien, et , pourquoi pas,  philosophe , de façon à honorer , comme il se doit, la déesse faite femme que chacune d'entre nous incarne avec tant de panache .


mercredi 25 septembre 2013

   Je vais sans doute vous étonner, mais moi, j'adore tourner en rond . Et si je le pouvais , je passerais ma vie à virevolter. Je pense que , déjà , in utero, je devais m'exercer à tournoyer . C'était inscrit dans mes gènes. Du coup, on a du mal à me suivre . Je donne le tournis , même .

   Pourtant, si l'on y réfléchit bien, le cercle est omniprésent dans notre vie. Il n'y a qu' à lever les yeux pour s'en apercevoir . Le soleil , il est bien rond . Et la lune aussi.  Quant à la terre, non seulement elle joue les derviches tourneurs du matin au soir, mais elle  s'est aussi mis en tête de courtiser le soleil en dansant voluptueusement autour de lui .  Elle n'a pas encore compris que ce n'est pas le meilleur moyen de lui courir après ...

    Nous-mêmes , à notre modeste échelle , nous n'arrêtons pas de voir et de faire des ronds.
Dès le réveil  , nous portons à nos lèvres tasses , bols et mugs, avant d'ingérer , plus tard dans la journée , des tartes  et des tourtes .  Sur la chaussée, le conducteur est cerné de toute part.  Le cercle prolifère: volants, roues, panneaux d'interdiction et même feux de signalisation. Que dire des ronds-points ! On ne les compte plus . Sans la Place de l'Étoile , Paris ne serait plus Paris !

    Quant à nos enfants , on leur inocule le virus sans le savoir . Bien avant qu'ils n'apprennent à manier le compas , ils goûtent au vertige des carrousels, assistent à des spectacles de cirque , et font même des rondes à l école. Les  plus malchanceux d'entre eux sont gratifiés d une coupe au bol . Après ça , leurs parents ouvrent  des yeux ronds quand on leur dit qu'ils ne tournent plus rond ...

    Oui, le cercle à encore  un bel avenir devant lui . Et l'on aurait tort de s'en plaindre. Car quoi de plus magique qu'un cercle ? Demandez à Merlin l 'Enchanteur. Il en connaît un rayon sur les chevaliers de la table ronde . Donc bannissez une bonne fois pour toutes de votre langage l'expression " cercle vicieux", et préférez-lui " cercle vertueux ". Et surtout, n'ayez plus peur de tourner en rond .  Après tout , ne dit-on pas de la vie qu'elle est un tourbillon ?


lundi 23 septembre 2013

   Marguerite, c'est le nom d'une fleur . Et pas de n'importe laquelle. C' est la fleur-oracle de notre enfance, celle qui nous révèle , par son effeuillage, l'amour que nous porte l'élu de notre cœur . C'est aussi le nom de la célèbre courtisane immortalisée par Dumas fils: la Dame aux camélias. Une femme-fleur  arborant des camélias ! Dumas avait du flair quand il transmue Marie Duplessis en Marguerite Gautier. Car quoi de plus enivrant que de se glisser dans le sillage capiteux de cette hétaïre sulfureuse , qui traversa le ciel des demi-mondaines comme une étoile filante . Les météores laissent une empreinte bien plus profonde  que les astres éternellement fixés à la voûte céleste . Aussi lumineux soient-ils , ces derniers suscitent certes notre admiration, mais ils ne possèdent pas cette fulgurance capable de nous ébranler dans tout notre être .

Ce soir , à l'Opéra Garnier , une Etoile a incarné l'héroïne au destin tragique. Une étoile pas comme les autres. D'abord parce que c'est ma sœur et qu'elle illumine ma vie depuis des siècles . Et puis aussi parce que Dieu, en la créant, l' a dotée d'un don surnaturel , celui de séduire  les anges. Les séraphins ont sans doute été charmés par cette danseuse gracile , au teint diaphane moucheté d'éphélides et aux jambes interstellaires . Ils ont été conquis par sa bonté et son humilité aussi. Et sa ténacité . C'est pour cela qu ils l'ont prise sous leur aile . Quand elle évolue sur scène ,  ils descendent des cieux pour la bénir. Ce soir , ils étaient venus en grand nombre. Je les ai senti effleurer mon âme à plusieurs reprises . Je les ai même entendu sangloter quand Marguerite rejoint l'éternité . Réussir à émouvoir les anges , c'est un privilège qui  n'est pas donné à tout le monde . Alors , si un jour, vous avez la chance de contempler ma sœur danser, ne vous inquiétez pas de vous sentir parcourir de frissons. Ce sera simplement le frôlement des  plumes d'un ange , qui passe....



dimanche 22 septembre 2013


   Essaouira, le vent s’engouffre par tes créneaux en ton sein , et gonfle tes poumons de cité corsaire.Tel un navire de guerre,  tes  canons pointés vers l’horizon,  tu défies l’océan et ses lames en furie.  La blancheur de tes murs claque comme une voile, tandis que tes portes de bois posent leur regard bleu turquoise sur les  frêles silhouettes colorées s’écoulant le long des ruelles. En cet après-midi de printemps,  le soleil ruisselle sur  tes toits aplatis par la chaleur.

   Ignorant les passants,  deux chats noir ébène , enroulés comme deux rubans de réglisse, reposent à l’ombre d’un banc de pierre. Non loin, Amine , treize ans, me sourit et me fait signe de le suivre avec un air de mystère.Ses yeux noisette respirent la candeur et semblent heureux de me conduire là où personne ne va.

    Au détour d’un bâtiment lépreux , une cour secrète, de modestes dimensions, se révèle à ma vue. Là, emplissant l’espace de sa toute-puissance végétale, un ficus géant déploie ses vigoureuses ramures vers l’azur étincelant. Le colosse trône sur un entrelacs de racines , agrippant la terre  de ses doigts noueux.

   « Il a trois siècles », me dit Amine tout-bas, avec un respect empli de fierté.Puis il s‘assoit au pied de l’arbre , comme  pour m’en faire mesurer la grandeur , lui , le petit prince à la peau dorée au royaume des baobabs. Mes yeux éblouis remontent vers la couronne émeraude du vénérable ancêtre. Là-haut, depuis des siècles, les feuilles tissent un vaste étendard percé, à maints endroits,  par les coups de rapière du dieu soleil , et ce sont autant d’ étoiles qui me  clignent des yeux avec malice, dans cette petite cour aux mille et un délices.








samedi 21 septembre 2013

C’est la nuit, que, se dressant telle un phare au-dessus de la marée humaine qui déferle à ses pieds, la Koutoubia prend vie. Il faut être patient, guetter la venue du crépuscule depuis les hauteurs du Café de France, pour  être témoin de  sa métamorphose. Simple minaret le jour, elle se voile , la nuit, de mystère, et , s’harnachant de lumières, guide les pas du promeneur solitaire à travers cet océan de clameurs, d’odeurs et de saveurs ,vers la place Jemaa El Fna.

Peu à peu, les lampions des carrioles des marchands ambulants ouvrent leurs yeux d’or . Et déjà montent des réchauds à brochettes une fumée épaisse qui rappelle ces lourds nuages d’encens en suspension lors des célébrations religieuses. La place , jusque-là engourdie par le va-et-vient rhapsodique des touristes réchappés du souk,  émerge lentement  de sa torpeur. Elle se recueille avant d’accueillir d’autres hôtes, d’autres atmosphères . Et  on se plaît à imaginer qu’un génie tout-puissant se matérialise subitement dans le creuset de cette lampe merveilleuse .

Gesticulant comme une marionnette  dans sa djellaba blanche, un conteur officie devant son auditoire accroupi. Ses bras scandent la musique de ses paroles, tandis qu’au loin, s’élève dans les airs comme la voix aigrelette d’une cornemuse . Mais l’instrument est nerveux, et ses contorsions sonores , appuyées par le rythme effréné d’un tamtam,  tiennent plus de l’incantation propre à évoquer les djinns.

Mais déjà ,ce n’est plus l’Ecosse et ses lochs brumeux qui jaillissent à mes yeux, mais la Chine et son dragon fabuleux qui  fait trembler les hommes. L’animal, jusque-là tapi dans des profondeurs insondables , a fait brusquement surface ,et son corps de reptile aux écailles de feu ondule dans la foule. L’air, devenu irrespirable , s’embrase à son passage. Et tel Néron contemplant  Rome incendiée, je tréssaille de bonheur  quand enfin le cœur rougeoyant  de Marrakech se met à battre violemment .


mercredi 18 septembre 2013

Ça n'a pas l air , mais cela fait bientôt  trois semaines que BB Blog a vu le jour . Je m'en souviens encore . Ni péridurale , ni forceps ! Un accouchement sans douleur ! Le rêve ! Depuis , les insomnies sont devenues mes alliées . Normal , j'occupe mes nuits à le bichonner. Après consultation d' un spécialiste, le nourrisson se porte plutôt bien . Sa courbe de croissance est plus qu'honorable . Croisons les doigts !

Il faut dire que je l'emmène partout avec moi . Il a pris le soleil sur les plages de l'Ile de Beauté, a arpenté le Grand Foyer de l' Opéra Garnier ,  a parcouru la rue des Martyrs en  long et en large , et a même discouru avec feu les carpes du domaine de Marly-le-Roi. Versailles , ce sera pour plus tard . Procédons par étapes. 

Une chose est certaine ,  BB Blog possède un avantage indéniable sur ses congénères: il parle ! Rendez-vous compte ! C'est inouï . Il faut dire que la gestation a été longue . Il a fallu quelques années avant qu il ne soit finalement expulsé du  cortex de sa maman. Alors , il faut le comprendre . Il devait s'ennuyer ferme là-haut . Surtout que ses  idées se bousculent vite , et que le sang lui monte vite a la tête . Alors il a fallu qu il réagisse . Il a pris son courage à deux mains , a passé de longues nuits à parfaire son maniement de la langue française , et a mis un peu d'ordre dans la cervelle maternelle. C'est un BB très prévenant , comme vous pouvez le constater. Et surtout très prévoyant . Car il se doutait bien qu'un jour ou l'autre , sa génitrice partirait en vrille  si rien n était fait .

Pas étonnant donc , que BB Blog soit très choyé sur la blogosphère. Il reçoit beaucoup de courriers électroniques  . Il ne sait plus où donner de la tête parfois. Il a même reçu des demandes en  mariage . Vous imaginez ? Heureusement que sa maman veille au grain. Un BB Blog , c'était inespéré pour elle . Alors rien n'est trop beau pour lui.  Elle le pomponne . En ce moment , il est vêtu d'une grenouillère rouge . Le bleu , c'est trop commun. Il fallait qu'il se distingue des autres  . D'autant qu'il vient d'être sélectionné par le comité des Golden Blog Awards.  Ce n'est pas rien. Alors , soyez gentils . Votez pour lui . Il en a besoin . Car, il ne faut pas l'oublier , "Dur , dur d'être un BB!".





mardi 17 septembre 2013

Qu’on se rende au domaine de de Marly-le-Roi, et le premier sentiment qui nous étreint est la déception . Une majestueuse allée , bordée de sentinelles végétales, nous conduit avec pompe à un écrin de verdure. Mais cet écrin, il est désespérément vide. Seul un tracé approximatif suggère l’emplacement d’un château aujourd’hui disparu.

Jadis se dressait la vaste demeure royale, agrémentée de marbres et de dorures, où des laquais en livrée prévenaient le moindre des désirs royaux.On raconte que le Roi-Soleil affectionnait tout particulièrement de nourrir les carpes d’un bassin. Etrange prédilection , certes, mais, comme chacun sait, les carpes sont muettes et se contentent de faire des bonds . Subtile invitation au silence que Louis XIV adressait aux courtisans trop volubiles…A la place du bassin aux carpes, s’étale une cavité béante, parcourue d’herbes folles, où des chiens en liberté conditionnelle aiment à folâtrer.

Un autre tracé témoigne de l’emplacement des pavillons des invités royaux : Louis-le Grand choisissait avec soin les rares hôtes qui auraient le privilège de l’accompagner à Marly. Car plus qu’une résidence secondaire, Marly se voulait l’anti-Versailles, jardin secret d’un roi redevenu simple mortel. C’est ici que le monarque se dépouillait de sa grandeur , s’étourdissait au son des cascades de Le Nôtre , s’abîmait dans la contemplation des chevaux de pierre se cabrant sous la main de l’homme. Les cascades ont , elles aussi, déserté les lieux. On a du mal à concevoir que cette succession de talus herbeux avait pour vocation de recevoir l’eau vive.

Plus rien ne subsiste des splendeurs passées , comme si , par pudeur, l’histoire avait voulu effacer la part d’humain du fils de Louis XIII , pour ne retenir que la magnificence du grand monarque et de son Versailles. Le Roi-Soleil ne pouvait avoir sa part d’ombre, semble nous dire la postérité. Qu’en serait t’il si le bassin aux carpes existait toujours ? Aurait-on fait tomber le roi de son piédestal, lui qui traverse les siècles auréolé de gloire ? Saint-François charmait bien les oiseaux , et Orphée les bêtes sauvages . Pourquoi donc refuser au grand Louis le plaisir de commercer avec le monde aquatique ? 

A Marly, les pierres ne parlent pas. Point n’est besoin de s’extasier devant les œuvres d’artistes de renom. Mais, une fois surmontée la déception de ne pas succomber au sublime, alors nous vient imperceptiblement un sentiment nouveau. Le bonheur simple d’être si proche et si lointain d’un grand souverain , que l’on a du plaisir à imaginer au pied d’un bassin, l’œil pétillant, et riant aux éclats aux bonds de carpe de l’humanité.